L'ascension de la Dent du Géant est marquante, car elle réunit 2 ingrédients synonymes de difficulté: verticalité et altitude. La Dent du Géant serait probablement l'un des sommets, voire LE sommet de 4000 m le plus difficile si des cordes fixes n'étaient pas en place pour en faciliter l'ascension.
Néanmoins, il est nécessaire de posséder un niveau correct en escalade, certains passages n'étant pas équipés. Savoir se placer, savoir poser ses pieds limite aussi la dépense physique! On constate d'ailleurs que l'escalade libre, ici encore, rend l'ascension moins physique, comparé à un grimpé de corde certes basique mais où tout le corps est rejeté en arrière.
L'escalade au maximum en libre de la Dent du Géant est donc conseillée, le rocher est magnifique et seuls quelques mètres au-dessus du niveau moyen peuvent être faits à l'aide de la corde.
En outre, le grimpeur habitué aux manips de corde aura un confort accru dans la descente vertigineuse en rappels, en particulier versant sud.
Difficulté:
AD si on utilise la corde, ce qui est très physique pour les bras.
D- en escalade libre, avec moins de 10 m plus difficiles.
Cotation libre: ensemble ne dépassant pas le IV+. 2 passages plus durs (2 mètres en L1, + quelques mètres dans la raide cheminée au dessus des dalles Burgener, probablement plutôt V).
Matériel: piolet et crampons pour l'approche ; on les laisse à la "Salle à Manger". Casque.
Les grosses chaussures sont souvent préférables aux chaussons, à cause de l'escalade en fissures, et de la fraîcheur rédhibitoire.
6 dégaines doivent suffire. Quelques coinceurs, plutôt moyens et gros. 2-3 sangles.
Corde de rappel de 100 m. Avec 2 brins de 60 m, on trouve des relais confortables à la descente de la face sud, mais ce n'est pas obligatoire. Vu le nombre de relais, on pourrait opter pour une corde plus courte, mais cela ne facilite pas grand chose.
Matériel d'assurage et de descente, sans oublier les autobloquants.
Astuce: les protections sont parfois difficiles à placer (L4 / L5). Un autobloquant coulissant sur la corde fixe + mousqueton dans lequel on aura placé notre corde d'assurage permet de limiter le risque de chute.
Époque et horaires: la Dent du Géant est faisable généralement de juin à octobre, en choisissant des journées calmes. La neige fraîche est gênante, mais elle se dépose finalement peu dans cette face raide et lisse. La Dent du Géant sèche très vite. Le vent par contre peut-être très froid.
Beaucoup préfèrent partir assez tard (première benne, voire plus tard) et réaliser l'ascension en milieu de journée: on bénéficie un peu plus du soleil, mais cela implique un retour tardif au refuge, et des risques objectifs supplémentaires.
Les orages sont redoutables sur la Dent du Géant. Je préconise de partir assez tôt, on trouvera moins de monde, et la fraîcheur matinale sera vite oubliée. En outre, moins de risques d'orages, et de chutes de pierres. Et de toute façon le soleil arrive très tard dans cette face sud-ouest!
L'horaire moyen est de 9-10h sans se presser, de Torino à Torino. Un réveil vers 5-6h (suivant la rapidité du groupe) permet d'attraper la benne de retour en été. Sinon un peu plus tard mais pas trop, si on prévoit de rester au refuge.
Description de l'itinéraire:
Glacier: Depuis Torino, passage au Nord des aiguilles Marbrées, pour remonter la langue glaciaire au Nord-Est du col de Rochefort, en direction de la Dent.
Approche: c'est la même que pour les arêtes de Rochefort (on les enchaîne parfois avant la Dent du Géant). Après l'accès glaciaire assez court, il s'agit de remonter le socle de la Dent, "la Gencive".
Ce socle se parcourt souvent crampons aux pieds suivant l'enneigement.
Au sommet du glacier (plus raide, crevasses), vers 3600 m, on observe un couloir évident, qui mène au col à droite d'un grand Gendarme (3665 m sur la carte).
Ce couloir peut se remonter en crampons en début de saison. S'il est sec (fréquent), le passage est environ 30 m à gauche, par des rampes et vires évidentes (quelques cairns, mais surtout des traces de passage). Ces vires entrecoupées de petits passages d'escalade facile ramènent presque au couloir au niveau du col.
Du col, on remonte sans difficulté une sorte d'arête peu marquée en direction de gros gendarme à droite de la Dent. On vient buter à droite sur un ressaut qui semble trop raide, que l'on franchit par un dièdre peu marqué vers la gauche et une vire encore à gauche. On remonte ensuite des sortes de couloirs peu marqués, en se tenant toujours près de l'arête à droite qui sépare une face
Nord-Ouest de la Face Sud-Ouest. Quelques pas d'escalade très courts ponctuent cette partie plutôt facile.
On débouche vers 3800 m sur une petite épaule en neige, au pied de roches verticales défendant l'accès de la Salle à Manger. De là, certains traversent horizontalement à gauche et débouchent par des couloirs glacés à la Salle à Manger (crampons utiles). L'itinéraire classique part au contraire à droite (est), descend même légèrement pour contourner ces ressauts et sortir à la Salle à Manger par une courte pente de neige, orientée sud-est.
La Salle à Manger est un confortable champ de neige, au pied de la face sud de la Dent du Géant. On peut y laisser ce qui ne servira pas dans l'ascension proprement dite, le matériel glaciaire.
Dent du Géant: Accès horizontal à gauche vers une épaule. Un éboulement a modifié les 20 premiers mètres il y a quelques années, les rendant plus difficiles.
L1: Départ par une vire, puis environ 15 m raides mais avec de bonnes prises (4c max) avec un passage de 2 m plus durs (5 ?). De nombreux points d'assurages, et parfois une corde laissée en place permettent de faciliter les pas les plus durs. On retrouve un relais au pied d'un grand dièdre en ascendance à gauche.
L2: Ce dièdre se remonte sans difficulté (III+ max, 45 m), un petit pas plus dur pour rejoindre une très bonne vire au sommet.
L3: On se situe au pied des dalles Burgener. Les remonter par la gauche (fissures, IV/IV+). On peut faire relais à 50 m, sur des vires. La corde fixe est presque gênante dans cette partie si on ne s'en sert pas. Bonnes protections sur coinceurs et sur spits (espacés), très belle escalade.
L4: Au dessus de ces vires, une dalle lisse semble difficile. Elle se franchit par des prises petites mais franches (IV+). Grande traversée ascendante à droite (III/IV), dominant les dalles, pour rejoindre le pied d'une cheminée verticale difficile (V+ ?). On peut faire relais au pied ou au sommet de cette cheminée. Bon relais au sommet (soleil matinal), à condition d'avoir géré le tirage.
L5: Nouvelle cheminée raide (IV+) qui se transforme en arête qui mène au premier sommet (encore quelques pas de IV). La corde fixe disparait à cet endroit. Plusieurs relais possibles, je file parfois directement au relais sous le premier sommet (grande longueur, attention au tirage).
L6 (ou L7): accès au sommet principal. On traverse sous le premier sommet (un pas), puis petite brèche, et descente à la brèche entre les 2 sommets. Pour rejoindre la brèche, passage très raide à la descente sur 2 m, équipé d'une main courante. Nécessité de bien protéger cet endroit (il y a un spit+maillon).
Accès au sommet principal par un dernier passage équipé d'une corde.
Descente:
Demande une très bonne expérience des rappels, et de la lucidité. Rappels parfois en fil d'araignée, ambiance impressionnante.
Retour à la brèche entre les 2 sommets. Un relais se trouve juste à l'aplomb du sommet ouest, en descendant au sud quelques mètres faciles depuis la brèche.
De là en 3 rappels.
R1: long rappel (50 m), en légère diagonale à main gauche quand on descend (ouest). Très bonne plate-forme. Si on n'est pas sûr de la longueur de corde, on trouve un autre relais beaucoup plus haut, bien moins confortable.
R2: long rappel (plus de 50 m) dans de belles dalles jusqu'à une petite vire. Ou bien 35 m si on n'a pas de grande corde (relais au pied d'un dièdre).
R3: 30 m jusqu'au sol, ou 50 m depuis le relais au pied du dièdre.
Si on manque de temps, on peut descendre dans la voie de montée. Plus long et gênant pour d'autres cordées, mais il y a des relais chainés équipés.
On peut également descendre directement depuis le premier sommet (bon relais). Il faut 2*60m pour rejoindre la bonne plate-forme du premier relais de la descente face sud.
La pente de neige donnant accès à la Salle à Manger
Le Grand Dièdre de la partie inférieure de la Dent du Géant
Les dalles Burgener. Une cordée dans la cheminée supérieure difficile.
La cheminée dominant les dalles Burgener à la Dent du Géant
L'arête sommitale, avec le sommet ouest de la Dent du Géant
Descente en rappels dans la face sud de la dent du Géant